La vie sur un corde raide.
D’une enfance chahutée jusqu’à trois ans de cellule d’isolement dans l’attente d’une condamnation à mort ; de la vie d’un fugitif international jusqu’aux ors du Quai d’Orsay, telle a été mon existence d’imposteur. Un exilé de moi-même.
Près d’un demi-siècle d’imposture, de mensonge et de tricherie.
Imaginez que, pendant plus de quarante-cinq ans, vous devez passer vos jours à vous faire passer pour quelqu’un d’autre parce que vous n’avais pas une identité. Que chaque jour vous devais mettre en scène une mascarade pour cacher votre passé, sinon c’est l’incarcération immédiate.
En effet, fin des années soixante-dix, je suis évadé de prison juste avant d’être condamné pour avoir volé un avion militaire. Un crime qui, à l’époque, était passable de la peine capitale. Je suis devenue fugitif, sans papiers, sans avenir et sans espoir. Au début de mon cavale, j’ai estimé mes chances de rester en liberté d’être quasi nulle, mais le destin avait un tout autre scenario pour ma vie.
« Après mon évasion j'ai été contraint à une vie d'imposture. »
Sans papiers ni diplôme j’ai été obliger de survivre dans un monde hostile, conforme et bureaucratique. J’ai sillonné le globe à la recherche d’une identité. Un cours effréné vers un future incertain. Poussé par un fort désir de réussir, j’ai adopté plusieurs identités et j’ai exercé plusieurs métiers.
J’ai travaillé comme chirurgien, ingénieur, agriculteur, cameraman de guerre et restaurateur. Je me suis fait passer pour pilote, financier ou encore architecte naval. J’ai créé et dirigé des compaties aériennes et des sociétés high-techs. Fugitif, recherché par Interpol, j’ai sillonné les couloirs du place Vendôme et l'hôtel de Brienne. Président d’une chambre de commerce international, j’ai mené une vie de jet-set, a côtoyé présidents et ministres. Toujours poussé par un ego surdimensionné et une capacité de convaincre je suis devenu directeur sur plusieurs grands projets industriels.
Comment suis arrivé là ? Qu’est-ce qui pousse un homme dans une imposture perpétuelle et sans issue ?
Une enfance difficile
Mes parents jeunes et instables se disputent continuellement. Je suis abandonné, ballotté et passe ma jeunesse, livré à moi-même dans la ferme de mes grands-parents en Afrique.
Puis c’est l’école, et dès mon premier jour c’est la galère, personne ne m’aime. Je dois me bagarrer constamment. Je me forge un caractère fort, prêt à confronter tous les défis ; je parcours les vallées à la recherche d’un léopard, ou je dors dans une fosse pleine de serpents mortels.
Ensuite, c’est l’adolescence. Je m’éloigne de la société et l’école et plonge dans la drogue et la délinquance. Les audaces deviennent plus en plus osées, jusqu’à que je vole un avion de tourisme juste pour faire un tour.
« Pour découvrir la liberté au-delà de ma prison de souffrance. »
Je prendre goût pour l’aviation et je rejoins l’armée de l’air avec l’espoir de devenir pilote de chasse. N’ayant jamais appris à obéir aux ordres ou à vivre dans un environnement discipliné, je n’arrive pas à m’intégrer à l’armée. Je m’enfuis mais je suis arrêté et envoyé en prison militaire. De retour, plein d’amertume devant l’évidence que je ne serais pas pilote de chasse, je décide de voler un hélicoptère de l’armé. Miraculeusement l’armé me donne une seconde chance, mais l’envie de voler est trop fort. Je récidive et je vole un avion de chasse.
Conscient des conséquences de mon acte, je prendre la fuite. C’est la cavale. Je travers la frontière sans papiers, mais je suis à nouveau arrêté et mise en prison. Après quelques évasions spectaculaires, c’est le trou. L’isolement qui va durer trois ans. C’est long quand on a vingt ans. Beaucoup ne résistent pas, mais je suis d’une autre trempe. La survie mentale devient un lute perpétuel contre la démence. La survie physique passe par le mort d’un homme qui a tenté de me violer.
Dans la solitude de ma cellule, a l’ombre de la potence, je ne perdre pas espoir. J’élabore une stratégie pour devenir un homme libre et honnête.
Imposteur fortuit
Avant mon passage devant le tribunal militaire, je m’évade, vole un passeport et part pour l’Europe. C’est encore la cavale, sans papiers, sans argent mais je ne doute pas une seconde et tente de mener une vie normale. Je vais de pays en pays où j’enchaîne des petits boulots. Quand il n’y a pas de travail, je mendie, ou je vole.
Je finirai en Israël ou je rejoins un kibboutz. J’apprends la langue et travaille dans les champs de coton. Je trouve l’amour mais je ne peux pas dévoiler mon passé, donc j’invente mon premier personnage – je suis étudiant en médecine. Pour donner crédibilité à mon personnage je falsifie des diplômes et trouve un travail comme interne dans un hôpital.
« Ce petit mensonge a ouvert la porte à un destin inattendu. »
Ma compagne tombe enceinte et je dois penser à l’avenir. On m’aide à régulariser ma situation pour me permettre de me marier. Je trouve du travail comme interne en chirurgie dans un grand hôpital. Pendent une grève des médecins, Je suis en bloc opératoire ou j’assiste des interventions chirurgicales. Je me forge une réputation et on m’invite à travailler dans une Institut de recherche médicale. Évidemment je ne peux pas accepter, je n’ai pas le moindre diplôme.
Craignant d’être démasqué, je pars pour la France et m’installe à Lyon avec ma petite famille. C’est un nouveau départ, et une nouvelle identité.
Chef d’entreprise
Je renonce à la médecine et je trouve du travail comme vigile dans un centre d’informatique. Mon ambition d’avoir une vie meilleure se renforce. Au culot, sans la moindre expérience, je postule un poste d’ingénieur. Je travaille sur des projets de construction de centrales thermiques au Yémen et en Russie. C’est un nouveau personnage, un nouveau départ.
Je pouvais en rester là, mais poussé par mon ego démesuré et ambition vorace, je vise plus haut. Au milieu des années quatre-vingt, le terrorisme se répand en Europe. Des bombes dans des lieux publics font de nombreuses victimes. J’y voit une opportunité et crée, en partenariat avec une société Israélienne, une entreprise de fabrication des robots mobiles pour désamorcer les bombes. Malgré un mandat d’arrêt international je sillonne les couloirs de la place Vendôme et Hôtel de Brienne pour vendre mes robots.
Monsieur le Président
On parle beaucoup de mes robots israéliens et je suis invité à rejoindre le conseil d’administration de la Chambre de commerce franco-israélienne. Très vite je suis élu président. La porte est ouverte à des relations de haut niveau industrielles et politiques. Je dîne avec le Premier ministre d’Israël Ariel Sharon au quai d’Orsay et je suis invité à des fonctions diplomatiques et participe aux visites d’État. Le Conseil d’administration du Canton de Genève me décerne même un hommage.
Les projets d’aviation
J’ai des projets d’aviation : navettes hélicoptères, avion d’affaires et même un centre de maintenance d’avions de ligne. Mes projets attirent les subventions mais hélas en fréquentant les politiciens, l’argent s’évapore dans des voyages de rêve et des soirées dans des restaurants étoilés.
Soudain c’est la dégringolade. Mes parrains politiques ont des problèmes avec la justice. Je m’enfuis en direction de l’Afrique du Sud. Quatorze mille kilomètres, seul sur un voilier. Seul contre l’océan et vents. Pour seul compagnie mon instinct de survie. Comme pendant mon séjour en isolation, je ne me laisse pas abattre. Je fais des projets pour l’avenir.
« Je n’avais nulle part où aller, donc je suis retourné dans la gueule du lion. »
Une fois sur place je prends un crédit et achète un petit avion de tourisme que je mets en service des touristes pour visiter les parcs safari. Je reprends une compagnie d’aviation régionale en difficulté. Mais je n’arrive pas à redresser la compagnie et c’est le dépôt de bilan. La publicité et les accusations de mauvaise gestion augmentent le risque d’être démasqué je prépare ma fuite.
La Télévision
C’est sur la côte Est de l’Afrique du Sud que je crée une société de production de télévision. J’ai des projets de devenir un réalisateur, metteur en scène, ou encore cadreur. Je réalise des films publicitaires et des courts métrages, mais craignant de me faire rattraper je plie bagage et retourne en Israël.
Fort de ma courte expérience de la télévision en Afrique, je réussie à me fais embaucher comme cameraman pour la télévision nationale. Je couvre surtout les insurrections des Palestiniens et la guerre du Liban.
Pour me détendre, je me remets à la voile. Je crée une société de charter et balade des passagers entre Israël, Chypre et la Turquie.
Architecte Naval
Une rencontre inattendue me fait glisser dans la peau d’un architecte naval. Je suis chargé du contrôle de stabilité des chalutiers pour le ministère de la pêche. Comme toujours, je progresse vite. Je m’associe avec un chantier naval qui fabrique des vedettes pour les garde-côte et l’armée israélienne. Je construire un ferry de passagers pour la Sierra Leone. A la fin de la construction, je pars à Freetown pour la mise en service du bateau.
« Le lendemain de mon arrivée c’est la guerre qui éclate. J’étais coincé. »
Avec un pilote Anglais, nous volent un hélicoptère avec l’intention de rejoindre Conakry en Guinée mais une panne nous oblige d’atterrir à l’aéroport de Freetown. Dans le chaos et confusion je réussis à prendre un vol vers La Côte d’Ivoire.
En Sierra Leone, le client du ferry est tué et ses biens disparaissent. C’est encore le dépôt de bilan pour ma société. Je m’enfuis vers la Belgique.
Je reprends un bar restaurant en centre-ville à Gand. Les filles et l’alcool mettent fin à mon mariage et à mon restaurant. C’est la banale affaire d’un mari mafieux jaloux qui déclenche une investigation de la police. Je dois prendre la poudre d’escampette.
Je retourne en Afrique ou je me lance dans la finance. Je fais des montages financiers pour plusieurs sociétés et je dirige un grand projet d’achat d’une usine. Une banque me fait confiance mais je détourne l’argent pour acheter une villa de luxe. Les affaires vont mal et un client finira par porter plainte. J’abandonne tout et retourne en Europe.
L’ascension
Je prendre la gestion d’un camping dans l’Isère. À la fin de la saison je rentre en Belgique où je deviens vendeur de produits d’étanchéité. Ma personnalité antisociale n’étant pas compatible avec la vente, c’est l’échec.
Les bateaux et la mer, je les connaît bien. Je trouve un poste d’ingénieur de la propulsion des porte-containeurs et unités offshore dans une société Finlandaise. Ils me forment sur leurs produits et je suis vite devenu spécialiste. On me dépêche sur des chantiers en Hollande, Norvège, Turquie et Chine pour diriger les travaux sur la construction des bateaux destinés à l’offshore.
« J’ai fait une grosse erreur qui a coûté cher à la société, il était temps de dire au revoir. »
C’est une société Américaine qui m’embauche pour être responsable technique sur un projet de construction en Chine d’un bateau de forage d’une valeur de 1,5 milliard de dollars. Je ne commets aucune erreur mais la crise financière de 2008 met fin à ce projet. Je retourne en Belgique.
Fort de mon expérience en Chine, je suis embauché comme superviseur technique sur la construction d’un bateau de forage en Norvège. Ensuite je pars pour les champs pétroliers en Angola ou je suis directeur technique pour la société nationale de pétrole. Je tombe malade et est contraint de retourner en Europe.
J’acquiers une solide réputation de manager technique dans les grands projets offshore. Je suis embauché comme directeur technique par une grande société pétrolière pour gérer la construction d’une plateforme offshore en Italie et au Congo. Ensuite c’est encore la direction d’un méga projet de 1,5 milliard de dollars en Chine et la Brésil pour une firme Hollandaise.
Un des leaders mondiaux de l’ingénierie et construction offshore à Dubaï m’embauche pour diriger le département ingénierie en Inde. Je suis patron de plus de quatre cents ingénieurs. Je dirige des projets en Arabie Saoudite, Abu Dhabi et le Mexique.
Toujours peur d’être dévoilé, Je me mets en conseil indépendant d’ingénierie. Je travail sur des grands projets de gaz en Russie, ou encore en Oman et Angola.
La déchéance
Je gagne énormément d’argent. J’acheté une villa dans un marina, des voitures de sport, des motos et des bateaux. Je cherche à construire une identité d’un homme qui as réussi sa vie, mais je sens de plus en plus seule dans ma cage dorée. C’est la déprime ; quarante ans de stress et de mensonges qui me rattrapent enfin. Je réalise que je ne peux pas continuer cette vie d’imposteur.
« Le moment était venu d’assumer mon passé. »
Je passe deux ans sous traitement psychiatrique. A la fin de mes soins, je me débarrasse de tous mes jouets, et la maison et je m’installé à bord de mon vieux voilier. C’est un bateau qui, après avoir sillonné les mers du nord de l’Europe pendant un demi-siècle, dormait au fond d’un port, attendant qu’on s’occupe de lui pour vivre de nouvelles aventures.
Pendant trois ans je reconstruis seule ce bateau épave. Et en même temps, moi-même. Je n’ai plus besoin de faire semblant, de mentir.
Fini l’imposture.
Un homme renaisse
Fort de ce parcours extraordinaire de l’innocence à la déchéance, j’ai pu construire l’homme que je suis aujourd’hui : bien dans ma peau, simple et heureux. J’ai enfin trouvé mon identité. Plus besoin de mentir, d’éblouir ni de tromper. Je me force d’être humble, fidèle et sincère. Je ne veux plus me cacher derrière des masques et les mascarades.
Bien sûr que les réflexes du passé sont toujours là. La tentation de recommencer est toujours présente. Je me bats chaque jour pour résister car d’avoir une identité est bien plus précieuse que d’avoir l’argent ou une situation.
D’une enfance chahutée jusqu’à trois ans de cellule d’isolement dans l’attente d’une condamnation à mort ; de la vie d’un fugitif international jusqu’aux ors du Quai d’Orsay, telle a été mon existence d’imposteur. Un exilé de moi-même.
Près d’un demi-siècle d’imposture, de mensonge et de tricherie.
Imaginez que, pendant plus de quarante-cinq ans, vous devez passer vos jours à vous faire passer pour quelqu’un d’autre parce que vous n’avais pas une identité. Que chaque jour vous devais mettre en scène une mascarade pour cacher votre passé, sinon c’est l’incarcération immédiate.
En effet, fin des années soixante-dix, je suis évadé de prison juste avant d’être condamné pour avoir volé un avion militaire. Un crime qui, à l’époque, était passable de la peine capitale. Je suis devenue fugitif, sans papiers, sans avenir et sans espoir. Au début de mon cavale, j’ai estimé mes chances de rester en liberté d’être quasi nulle, mais le destin avait un tout autre scenario pour ma vie.
« Après mon évasion j'ai été contraint à une vie d'imposture. »
Sans papiers ni diplôme j’ai été obliger de survivre dans un monde hostile, conforme et bureaucratique. J’ai sillonné le globe à la recherche d’une identité. Un cours effréné vers un future incertain. Poussé par un fort désir de réussir, j’ai adopté plusieurs identités et j’ai exercé plusieurs métiers.
J’ai travaillé comme chirurgien, ingénieur, agriculteur, cameraman de guerre et restaurateur. Je me suis fait passer pour pilote, financier ou encore architecte naval. J’ai créé et dirigé des compaties aériennes et des sociétés high-techs. Fugitif, recherché par Interpol, j’ai sillonné les couloirs du place Vendôme et l'hôtel de Brienne. Président d’une chambre de commerce international, j’ai mené une vie de jet-set, a côtoyé présidents et ministres. Toujours poussé par un ego surdimensionné et une capacité de convaincre je suis devenu directeur sur plusieurs grands projets industriels.
Comment suis arrivé là ? Qu’est-ce qui pousse un homme dans une imposture perpétuelle et sans issue ?
Une enfance difficile
Mes parents jeunes et instables se disputent continuellement. Je suis abandonné, ballotté et passe ma jeunesse, livré à moi-même dans la ferme de mes grands-parents en Afrique.
Puis c’est l’école, et dès mon premier jour c’est la galère, personne ne m’aime. Je dois me bagarrer constamment. Je me forge un caractère fort, prêt à confronter tous les défis ; je parcours les vallées à la recherche d’un léopard, ou je dors dans une fosse pleine de serpents mortels.
Ensuite, c’est l’adolescence. Je m’éloigne de la société et l’école et plonge dans la drogue et la délinquance. Les audaces deviennent plus en plus osées, jusqu’à que je vole un avion de tourisme juste pour faire un tour.
« Pour découvrir la liberté au-delà de ma prison de souffrance. »
Je prendre goût pour l’aviation et je rejoins l’armée de l’air avec l’espoir de devenir pilote de chasse. N’ayant jamais appris à obéir aux ordres ou à vivre dans un environnement discipliné, je n’arrive pas à m’intégrer à l’armée. Je m’enfuis mais je suis arrêté et envoyé en prison militaire. De retour, plein d’amertume devant l’évidence que je ne serais pas pilote de chasse, je décide de voler un hélicoptère de l’armé. Miraculeusement l’armé me donne une seconde chance, mais l’envie de voler est trop fort. Je récidive et je vole un avion de chasse.
Conscient des conséquences de mon acte, je prendre la fuite. C’est la cavale. Je travers la frontière sans papiers, mais je suis à nouveau arrêté et mise en prison. Après quelques évasions spectaculaires, c’est le trou. L’isolement qui va durer trois ans. C’est long quand on a vingt ans. Beaucoup ne résistent pas, mais je suis d’une autre trempe. La survie mentale devient un lute perpétuel contre la démence. La survie physique passe par le mort d’un homme qui a tenté de me violer.
Dans la solitude de ma cellule, a l’ombre de la potence, je ne perdre pas espoir. J’élabore une stratégie pour devenir un homme libre et honnête.
Imposteur fortuit
Avant mon passage devant le tribunal militaire, je m’évade, vole un passeport et part pour l’Europe. C’est encore la cavale, sans papiers, sans argent mais je ne doute pas une seconde et tente de mener une vie normale. Je vais de pays en pays où j’enchaîne des petits boulots. Quand il n’y a pas de travail, je mendie, ou je vole.
Je finirai en Israël ou je rejoins un kibboutz. J’apprends la langue et travaille dans les champs de coton. Je trouve l’amour mais je ne peux pas dévoiler mon passé, donc j’invente mon premier personnage – je suis étudiant en médecine. Pour donner crédibilité à mon personnage je falsifie des diplômes et trouve un travail comme interne dans un hôpital.
« Ce petit mensonge a ouvert la porte à un destin inattendu. »
Ma compagne tombe enceinte et je dois penser à l’avenir. On m’aide à régulariser ma situation pour me permettre de me marier. Je trouve du travail comme interne en chirurgie dans un grand hôpital. Pendent une grève des médecins, Je suis en bloc opératoire ou j’assiste des interventions chirurgicales. Je me forge une réputation et on m’invite à travailler dans une Institut de recherche médicale. Évidemment je ne peux pas accepter, je n’ai pas le moindre diplôme.
Craignant d’être démasqué, je pars pour la France et m’installe à Lyon avec ma petite famille. C’est un nouveau départ, et une nouvelle identité.
Chef d’entreprise
Je renonce à la médecine et je trouve du travail comme vigile dans un centre d’informatique. Mon ambition d’avoir une vie meilleure se renforce. Au culot, sans la moindre expérience, je postule un poste d’ingénieur. Je travaille sur des projets de construction de centrales thermiques au Yémen et en Russie. C’est un nouveau personnage, un nouveau départ.
Je pouvais en rester là, mais poussé par mon ego démesuré et ambition vorace, je vise plus haut. Au milieu des années quatre-vingt, le terrorisme se répand en Europe. Des bombes dans des lieux publics font de nombreuses victimes. J’y voit une opportunité et crée, en partenariat avec une société Israélienne, une entreprise de fabrication des robots mobiles pour désamorcer les bombes. Malgré un mandat d’arrêt international je sillonne les couloirs de la place Vendôme et Hôtel de Brienne pour vendre mes robots.
Monsieur le Président
On parle beaucoup de mes robots israéliens et je suis invité à rejoindre le conseil d’administration de la Chambre de commerce franco-israélienne. Très vite je suis élu président. La porte est ouverte à des relations de haut niveau industrielles et politiques. Je dîne avec le Premier ministre d’Israël Ariel Sharon au quai d’Orsay et je suis invité à des fonctions diplomatiques et participe aux visites d’État. Le Conseil d’administration du Canton de Genève me décerne même un hommage.
Les projets d’aviation
J’ai des projets d’aviation : navettes hélicoptères, avion d’affaires et même un centre de maintenance d’avions de ligne. Mes projets attirent les subventions mais hélas en fréquentant les politiciens, l’argent s’évapore dans des voyages de rêve et des soirées dans des restaurants étoilés.
Soudain c’est la dégringolade. Mes parrains politiques ont des problèmes avec la justice. Je m’enfuis en direction de l’Afrique du Sud. Quatorze mille kilomètres, seul sur un voilier. Seul contre l’océan et vents. Pour seul compagnie mon instinct de survie. Comme pendant mon séjour en isolation, je ne me laisse pas abattre. Je fais des projets pour l’avenir.
« Je n’avais nulle part où aller, donc je suis retourné dans la gueule du lion. »
Une fois sur place je prends un crédit et achète un petit avion de tourisme que je mets en service des touristes pour visiter les parcs safari. Je reprends une compagnie d’aviation régionale en difficulté. Mais je n’arrive pas à redresser la compagnie et c’est le dépôt de bilan. La publicité et les accusations de mauvaise gestion augmentent le risque d’être démasqué je prépare ma fuite.
La Télévision
C’est sur la côte Est de l’Afrique du Sud que je crée une société de production de télévision. J’ai des projets de devenir un réalisateur, metteur en scène, ou encore cadreur. Je réalise des films publicitaires et des courts métrages, mais craignant de me faire rattraper je plie bagage et retourne en Israël.
Fort de ma courte expérience de la télévision en Afrique, je réussie à me fais embaucher comme cameraman pour la télévision nationale. Je couvre surtout les insurrections des Palestiniens et la guerre du Liban.
Pour me détendre, je me remets à la voile. Je crée une société de charter et balade des passagers entre Israël, Chypre et la Turquie.
Architecte Naval
Une rencontre inattendue me fait glisser dans la peau d’un architecte naval. Je suis chargé du contrôle de stabilité des chalutiers pour le ministère de la pêche. Comme toujours, je progresse vite. Je m’associe avec un chantier naval qui fabrique des vedettes pour les garde-côte et l’armée israélienne. Je construire un ferry de passagers pour la Sierra Leone. A la fin de la construction, je pars à Freetown pour la mise en service du bateau.
« Le lendemain de mon arrivée c’est la guerre qui éclate. J’étais coincé. »
Avec un pilote Anglais, nous volent un hélicoptère avec l’intention de rejoindre Conakry en Guinée mais une panne nous oblige d’atterrir à l’aéroport de Freetown. Dans le chaos et confusion je réussis à prendre un vol vers La Côte d’Ivoire.
En Sierra Leone, le client du ferry est tué et ses biens disparaissent. C’est encore le dépôt de bilan pour ma société. Je m’enfuis vers la Belgique.
Je reprends un bar restaurant en centre-ville à Gand. Les filles et l’alcool mettent fin à mon mariage et à mon restaurant. C’est la banale affaire d’un mari mafieux jaloux qui déclenche une investigation de la police. Je dois prendre la poudre d’escampette.
Je retourne en Afrique ou je me lance dans la finance. Je fais des montages financiers pour plusieurs sociétés et je dirige un grand projet d’achat d’une usine. Une banque me fait confiance mais je détourne l’argent pour acheter une villa de luxe. Les affaires vont mal et un client finira par porter plainte. J’abandonne tout et retourne en Europe.
L’ascension
Je prendre la gestion d’un camping dans l’Isère. À la fin de la saison je rentre en Belgique où je deviens vendeur de produits d’étanchéité. Ma personnalité antisociale n’étant pas compatible avec la vente, c’est l’échec.
Les bateaux et la mer, je les connaît bien. Je trouve un poste d’ingénieur de la propulsion des porte-containeurs et unités offshore dans une société Finlandaise. Ils me forment sur leurs produits et je suis vite devenu spécialiste. On me dépêche sur des chantiers en Hollande, Norvège, Turquie et Chine pour diriger les travaux sur la construction des bateaux destinés à l’offshore.
« J’ai fait une grosse erreur qui a coûté cher à la société, il était temps de dire au revoir. »
C’est une société Américaine qui m’embauche pour être responsable technique sur un projet de construction en Chine d’un bateau de forage d’une valeur de 1,5 milliard de dollars. Je ne commets aucune erreur mais la crise financière de 2008 met fin à ce projet. Je retourne en Belgique.
Fort de mon expérience en Chine, je suis embauché comme superviseur technique sur la construction d’un bateau de forage en Norvège. Ensuite je pars pour les champs pétroliers en Angola ou je suis directeur technique pour la société nationale de pétrole. Je tombe malade et est contraint de retourner en Europe.
J’acquiers une solide réputation de manager technique dans les grands projets offshore. Je suis embauché comme directeur technique par une grande société pétrolière pour gérer la construction d’une plateforme offshore en Italie et au Congo. Ensuite c’est encore la direction d’un méga projet de 1,5 milliard de dollars en Chine et la Brésil pour une firme Hollandaise.
Un des leaders mondiaux de l’ingénierie et construction offshore à Dubaï m’embauche pour diriger le département ingénierie en Inde. Je suis patron de plus de quatre cents ingénieurs. Je dirige des projets en Arabie Saoudite, Abu Dhabi et le Mexique.
Toujours peur d’être dévoilé, Je me mets en conseil indépendant d’ingénierie. Je travail sur des grands projets de gaz en Russie, ou encore en Oman et Angola.
La déchéance
Je gagne énormément d’argent. J’acheté une villa dans un marina, des voitures de sport, des motos et des bateaux. Je cherche à construire une identité d’un homme qui as réussi sa vie, mais je sens de plus en plus seule dans ma cage dorée. C’est la déprime ; quarante ans de stress et de mensonges qui me rattrapent enfin. Je réalise que je ne peux pas continuer cette vie d’imposteur.
« Le moment était venu d’assumer mon passé. »
Je passe deux ans sous traitement psychiatrique. A la fin de mes soins, je me débarrasse de tous mes jouets, et la maison et je m’installé à bord de mon vieux voilier. C’est un bateau qui, après avoir sillonné les mers du nord de l’Europe pendant un demi-siècle, dormait au fond d’un port, attendant qu’on s’occupe de lui pour vivre de nouvelles aventures.
Pendant trois ans je reconstruis seule ce bateau épave. Et en même temps, moi-même. Je n’ai plus besoin de faire semblant, de mentir.
Fini l’imposture.
Un homme renaisse
Fort de ce parcours extraordinaire de l’innocence à la déchéance, j’ai pu construire l’homme que je suis aujourd’hui : bien dans ma peau, simple et heureux. J’ai enfin trouvé mon identité. Plus besoin de mentir, d’éblouir ni de tromper. Je me force d’être humble, fidèle et sincère. Je ne veux plus me cacher derrière des masques et les mascarades.
Bien sûr que les réflexes du passé sont toujours là. La tentation de recommencer est toujours présente. Je me bats chaque jour pour résister car d’avoir une identité est bien plus précieuse que d’avoir l’argent ou une situation.